La pêche artisanale


Natif de la Pointe des Pêcheurs, Paul Pere, vous révèle ses secrets. Après avoir fait partie des pêcheurs qui, sans en prendre conscience, ont détruit les ressources du lagon pendant plusieurs années, il en est devenu un fervent défenseur. Désormais, protecteur et respectueux des ressources, il vous invite à suivre son exemple. Les pêches artisanales ne sont plus que des activités de loisir. Les poissons sont malheureusement devenus trop petits et trop rares dans notre lagon pour permettre à une famille d’en vivre. La réhabilitation du milieu lagonaire s’impose pour que la Pointe des Pêcheurs mérite encore son nom.

D’où vient le nom : « Pointe des Pêcheurs » ?
En tahitien, cet endroit se nomme Nuuroa parce que le trait de côte est changeant en fonction des courants et des marées. Mais, comme c’est aussi une zone traditionnellement  poissonneuse et un lieu de rendez-vous pour les pêcheurs, on l’appelle “Pointe des Pêcheurs” en français.

De quelles manières pêchait-on au filet ici  autrefois ?
Autrefois, on pêchait avec de grands filets de 300m de longueur, appelés ’ûpe’a. Ils ont tellement brisé de coraux que ce genre de filet est aujourd’hui interdit. Il est encore autorisé de pêcher avec des filets de nylon mesurant moins de 50m et ayant des mailles de 4 cm. On utilise des filets à maille plus petites pour les ature migrateurs et les poissons sédentaires du lagon (pahoro, maito) (Délibération n° 88-183 AT du 8 décembre 1988 modifiée). Respecter ces règles est nécessaire. 

Y a-t-il une autre façon de pratiquer la pêche au filet?
Avec un filet  que l’on attache au corail, près de la passe, on forme une sorte de ‘U’. On rabat le piège pour coincer des ume dans le courant et on les attrape avec un harpon. Cette pêche  est nommée târou.

Comment pêche-t-on les langoustes ?
Très tôt, aux aurores, on part en pirogue et on les attrape à la main, dans les trous, sur la pente externe du récif, quand la mer est très calme. Malheureusement, il n’y en a presque plus aujourd’hui.

Y a-t-il encore des varo ?
J’en ai pêché quand j’étais enfant et je peux expliquer une des techniques pour les attraper. D’abord, il faut repérer les trous. Pour savoir si une bête est présente, on en bouche l’ouverture avec du sable. Si un varo habite ce trou, il souffle pour libérer l’entrée. On introduit dans le trou  une tige bardée d’hameçons et de la nourriture. Le varo grimpe sur cet appât pour le manger et on le tire délicatement vers le haut jusqu’à l’extraire de son trou. Il faut bien éviter de toucher ses pattes tranchantes. 

Pour quelle raison ramasse-t-on les bigorneaux ?
Le bigorneau, comme le bénitier, est utilisé pour provoquer la fermentation du lait de coco et de la pulpe de coco  râpée. C’est ainsi que l’on fabrique le mitihue et le taioro. Ces sauces accompagnent tous les plats du mâ’a tahiti.

Et l’épervier, à quoi sert-il ?
La pêche à l’épervier (’ûpe’a tâora) permet d’attraper des alevins  (’ôuma) qui servent d’appât. On les met dans une nasse (ha’ape’e) pour qu’ils restent vivants.  Il est peu fréquent que l’on fasse des fritures de ’ôuma.

Comment pratique-t-on la pêche à la ligne ?
Il y a plusieurs façons de pêcher à la ligne. La pêche à la palangrotte est le plus populaire parce qu’avec plusieurs hameçons on peut remonter plusieurs poissons en un seul coup. Il suffit d’avoir un fil enroulé autour d’une planchette et de laisser descendre la mitraillette, lestée d’un plomb, le long de la pirogue,  jusqu’au fond.
On peut pratiquer le même genre de pêche en profondeur avec un seul hameçon.
On peut lancer à la main la ligne avec un seul hameçon, lestée ou pas, à quelques mètres pour pêcher en surface ou en semi-profondeur.
Si on dispose d’une canne à pêche, avec ou sans moulinet, on peut lancer l’appât plus loin; mais on perd le plaisir de sentir le poisson mordre, au bout du doigt.

Quels appâts peut-on utiliser pour la pêche à la ligne?
La pieuvre permet de pêcher des balistes, des becs de canes, des carangues et bien d’autres espèces.
Les jeunes pousses d’algues nommées sargasses sont bonnes pour attirer les poissons herbivores (mârava).
Avec des  appâts artificiels (pieuvres en caoutchouc, cuillères,  plumes d’oiseau) on peut pêcher à la traîne ou en profondeur. Ce sont les ’ôrare, les ’ôperu, les ’î’ihi, les pâ’aihere qui se font prendre par ces leurres, le jour ou la nuit. 

Est-ce que vous voyez des pêcheurs au fusil à flèche ? 
La pêche au fusil est pratiquée par les riverains sportifs. On les voit partir très tôt le matin ou le soir, après leur journée de travail. S’ils ne prennent qu’un ou deux gros poissons ils ne sont pas destructeurs ; par contre ceux qui pêchent de nuit des poissons qui dorment ne sont pas des sportifs. Ce sont de lâches assassins-

Pratique t-on la pêche le soir ?
Le soir, on peut mettre un filet près du bord pour attraper les moi qui rentrent dans le lagon pour chasser leurs proies.  La pêche au moulinet, le soir et de nuit, est aujourd’hui la pêche la plus pratiquée à la Pointe des Pêcheurs. Les pièces sorties de l’eau sont belles et elles font oublier les bredouilles qui sont nombreuses. Les becs de canes et les carangues sont les pièces les plus courantes et les plus prisées. 

Comment pêche-t-on le paru?
C’est une pêche qui se pratique, au large et dans la passe, avec des lignes qui  peuvent descendre jusqu’à 800 m de profondeur. On utilise du calmar ou du poisson-volant comme appât et c’est avec un moulinet électrique que l’on remonte la ligne. Remonter à la main des centaines de mètres de fil est possible ; mais c’est fatigant et fastidieux.

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